– On nous a communiqué quelques numéros d’une revue intitulée France-Orient, publiée dans l’Inde, et où, parmi des articles dont la plupart sont purement littéraires ou même politiques, nous avons eu la surprise d’en trouver, sous la rubrique « Lettres orientales », quelques-uns qui présentent un tout autre caractère. Nous voulons parler surtout d’articles signés Alain Daniélou, qui se rapportent aux sciences et aux arts traditionnels de l’Inde, et dans lesquels, sans toucher directement au côté proprement métaphysique de la doctrine, l’auteur fait preuve de connaissances fort intéressantes et s’inspire d’un esprit véritablement traditionnel. Dans La science des symboles et les principes de l’art religieux hindou (n° d’octobre 1944), il insiste sur la nécessité, « pour comprendre les bases de l’art traditionnel hindou, de connaître d’abord le sens des symboles qu’il emploie » ; et cette compréhension « implique une connaissance profonde des lois qui régissent l’Univers ». Après avoir expliqué comment la science des symboles « fait partie de l’interprétation cosmologique des textes vêdiques », il donne divers exemples de son application à l’iconographie, parmi lesquels la description de Kâlî, qui est, comme il le dit « l’une des déités hindoues le plus souvent mal comprises ». – Dans La théorie hindoue de l’expression musicale (n° de décembre 1944), M. Daniélou, après avoir expliqué l’incompatibilité d’ordre technique qui existe entre la musique modale et la musique harmonique, donne un aperçu des effets qui peuvent être obtenus par la première, y compris son application thérapeutique. « Comme toutes les sciences hindoues, la science musicale est essentiellement l’application au monde des sons d’une théorie métaphysique des nombres et de leurs correspondances ; la théorie musicale hindoue n’est expérimentale que dans ses limitations, jamais dans ses principes ». Viennent ensuite quelques considérations particulièrement dignes de remarque sur la « spirale des sons » et la théorie des shrutis, ainsi que sur le principe des correspondances, par l’utilisation duquel « la science hindoue des sons dépasse de beaucoup la science moderne ». L’auteur paraît d’ailleurs s’être « spécialisé » surtout dans l’étude de la musique orientale, car on annonce d’autre part la publication d’un ouvrage de lui, Introduction à l’étude des gammes musicales, basé sur les mêmes principes traditionnels. La danse classique hindoue (n° de février 1945) expose succinctement les principes de cet art d’après le Nâtya-Shâstra et l’Abbinaya-Darpana. – L’alphabet sanscrit et la langue universelle (n° d’avril-mai 1945) est peut-être le plus important des articles de M. Daniélou, ou du moins de ceux dont nous avons eu connaissance, car il apporte des données vraiment inédites sur le Mahêshwara-Sûtra et la valeur symbolique des lettres de l’alphabet sanscrit.